La nécropole nationale de la 28ème brigadeCe monument est d’un style qui rappelle les cromlechs celtiques, pierres élevées en cercle pour rappeler le sacrifice suprême. Deux autres monuments se trouvent maintenant réunis sur ce lieu, celui du 60e RI et celui du 44e RI, dont les plaques ont été données par le père d’un soldat tué qui était fondeur. |
Historique
Le cimetière de la 28e Brigade dit « du Père Doncoeur » fut créé à la sortie de la guerre en 1919. Paul Doncoeur au début du conflit est versé comme aumônier militaire à la 28e Brigade. Cette dernière regroupait deux régiments de Belfort le 35e RI dit des As de trèfle, et le 42e RI dit des As de carreau, il va les accompagner jusqu’en 1918. La 28e brigade va s’illustrer en Champagne du 25 au 28 septembre 1915 à l’endroit du cimetière. Elle va emporter la première ligne allemande et va même être une des rares à faire une brèche dans la seconde ligne, 3kms plus loin. Mais cet acharnement va lui coûter très cher. Les régiments vont perdre la moitié des leurs hommes. Une fois reformés et reposés, ils vont partir vers d’autres régions du front où d’autres combats vont les attendre. A la fin de la guerre, Paul Doncoeur va revenir en terre de Champagne sur ce lieu mythique et bouleversant et prononcera ces paroles célèbres lors de son arrivée sur le champ de bataille: « J'ai vu, je crois, les aspects les plus horribles de la Mort durant la guerre. J'ai vu, dans les beaux blés de 1914, noircir sous le soleil d'un jour les premiers cadavres, j'ai vu, aux retranchements du fort de Vaux les vivants partager leurs abris avec des morts de 40 jours... Vous dirais-je que jamais mon cœur n'a souffert comme six mois après l’Armistice, quand revenant en champagne aux lieux de nos grandes batailles, devenus silencieux et déserts, j'ai dû voir, laissés depuis quatre ans au grand soleil de Dieu, a même le sol où ils étaient tombés, nos camarades de 1915.……….Oubliés! » La terre de la zone des combats est devenue une terre morte. Seules des familles errent encore sur le terrain à la recherche d’un fils disparu. La France se donne pour priorité de remettre en marche l’économie des territoires existants et la zone de l’ancien front est abandonnée et avec elle, les soldats qui ont permis à cette même France de rester libre. En avril 1919, Paul Doncoeur décide de retrouver ses morts et de construire un monument à leur mémoire. Son projet recueille l'enthousiasme. Deux, trois, puis dix volontaires encore sous les drapeaux acceptent de reporter leur démobilisation pour construire ce monument. Le 2 mai le petit groupe arrive sur les lieux. Aux dix volontaires du 35è et du 42è, s'ajoutent une douzaine de prisonniers autrichiens dont un charpentier qui leur sera très utile. Un camp est monté. Il est baptisé "le Toutim''. L’équipe va vivre cinq mois en symbiose dans des conditions spartiates et bon enfant. Ils vont d’abord relever puis identifier les morts dispersés sur le champ de bataille dont bon nombre n’avaient encore aucune sépulture. Puis ils vont les inhumer, leur accordant le repos en ce lieu où ils ont donné leur vie. La vie du camp s’organise. Le groupe loge dans des cabanes faites de tôles récupérées et se nourrit de la chasse aux lapins. Lors de la visite d’une journaliste, ils l’accueillent au camp et lui font manger du civet. Ils lui avoueront à la fin du repas qu’elle a mangé du chat sauvage. Son article va susciter de la compassion et des dons vont affluer de toute l'Alsace pour ces pauvres malheureux soldats contraints à manger du chat. Le financement du monument est alors assuré. Les pierres de la croix et des tombes sont taillées dans les carrières de Euville en Lorraine. Le colonel Tesson du 35e RI est enterré face à la croix, entouré de ses quatorze commandants de compagnie, et des 159 officiers, sous-officiers, caporaux et soldats qui ont été retrouvés. Les 34 croix marquent l'emplacement des fosses communes qui regroupent 775 autres corps. Le monument est inauguré le 25 septembre 1919 par le Général PETIT et Monseigneur Tissier. Lors de la création des cimetières nationaux vers 1920 et de la suppression des multiples cimetières de guerre des régiments, celui-ci est un des rares à rester témoin du sacrifice d’une brigade unie dans la mort. Malheureusement il y a 40 ans, le service des sépultures a séparé la brigade en déplaçant ceux qui se trouvaient sous les grosses croix vers les ossuaires du cimetière de Souain « la Crouée ».