La nécropole nationale de la CrouéeLe cimetière de « la Crouée » est le troisième plus grand cimetière militaire 14-18 de France. Plus de 30 734 corps français y reposent dont 9050 seulement ont pu être identifiés et enterrés en tombes individuelles. Les 21 684 soldats inconnus sont regroupés dans 8 ossuaires. Créé en 1919 et aménagé jusqu’en 1924, ce cimetière regroupe les corps exhumés de centaines de petits cimetières, tombes et fosses communes des secteurs de Souain, Tahure, Perthes les Hurlus, Beauséjour, le Mesnil-lès-Hurlus, Hurlus, St Hilaire le Grand, St Souplet, Ste Marie à Py, Manre, et Suippes. |
Historique
Dès le début du conflit, les offensives menées par les belligérants laissent sur chaque champ de bataille, des milliers de morts à chaque attaque. Dans un souci d’hygiène, les Etats-majors doivent rapidement s’occuper des corps. Enlisé dans une guerre de position, chaque régiment crée son propre cimetière juste derrière la première ligne de front. Au début de la guerre, la tombe individuelle est le propre de l’armée allemande ; il n’en est pas de même pour l’armée française pour qui la fosse commune est de règle. La peur des soldats de mourir seuls, abandonnés entre les lignes et portés disparus, est latente. Elle les conduit à transgresser les consignes et à inhumer chaque fois que cela est possible, leurs camarades en tombes individuelles. Sous la pression des familles à partir de fin 1915, les soldats seront inhumés autant que possible en sépultures individuelles. L’Etat accordera au soldat une concession perpétuelle et individuelle dans les cimetières militaires de la zone armée. Mais les familles réclament de plus en plus le retour du corps du soldat dans sa commune natale. De 1915 à 1921, 240 000 corps sont restitués à leur famille, soit 30% des sépultures de combattants identifiés. Devant le coût que cela représente, l’Etat se montre réticent. Plusieurs cas de profanations sont connus en 1919 : des familles qui, la nuit, retournaient chercher le corps de leurs fils, frère ou mari. Mais ces cas restent très marginaux. L’identification des soldats tombés sur le champ d’honneur s’effectue grâce à leurs plaques d’identité (les soldats, en théorie, en portent deux : l’une pour établir le procès verbal du décès, l’autre pour identifier le corps en cas d’exhumation ultérieure). Mais bien souvent il n’y en a qu’une seule, qui une fois enlevée pour le procès verbal, laisse le corps non identifié par la suite. Les soldats identifiés sont inhumés dans une tombe individuelle. Ceux dont l’identité reste inconnue sont regroupés dans les ossuaires. Dans les tranchées, leur nom écrit sur la croix de bois à la craie ou au crayon, est vite effacé avec les intempéries. Ceci explique que de nombreux soldats identifiés pendant la guerre sont vite devenus inconnus. Les soldats plaçaient parfois dans la tombe une bouteille dans laquelle se trouvait spécifiée l’identité de la personne. La Commission nationale des sépultures militaires françaises est créée dès le lendemain de la guerre. Ce service mène une politique active d’identification et de regroupement des tombes au sein de grandes nécropoles. La tâche est immense et, six mois après l’Armistice, les soldats sont encore à même le sol où ils sont tombés. Chaque nécropole regroupe les sépultures de petits cimetières de régiments ; les ossements trouvés ou les corps non identifiés sont réunis en ossuaires. On trouve quatre types de stèle : la croix chrétienne, la stèle musulmane, la stèle israélite et la stèle libre penseur. Les cimetières militaires français sont entretenus par le service des nécropoles de l’Etat. Certains monuments et quelques rares cimetières comme celui de Laval sur Tourbe sont pris en charge par le « Souvenir français ». Un cimetière allemand se trouve accolé à l’arrière de la nécropole française. 13 786 soldats allemands y reposent dont 11 322 placés en ossuaires. Le peintre expressionniste August Make tué le 26 septembre 1914 à Perthes les Hurlus est inhumé dans un des ossuaires. Il est curieux de constater que les cimetières allemands de la zone du front sont souvent accolés aux cimetières français abolissant ainsi la différence dans la mort.